Née dans la ville des Nuits de Restif de la Bretonne,
c'est à Paris qu'elle se découvre un intérêt pour l'alchimie et pour l'illusionnisme, deux creusets de pratiques et de spéculation qui orientent le regard qu'elle porte sur le monde et dont elle nourrit ses recherches,
Historienne d'art, animant un séminaire au Collège International de Philosophie autour de l'invisible dans l'imaginaire de l'art et des représentations, elle travaille par ailleurs depuis plusieurs années à une histoire de Paris originale; une histoire non-linéaire mais une mémoire vivante, palimpsestueuse et quelquefois anachronique, qu'elle investit comme une matrice poétique d'écritures sur la page comme dans la ville.
"Mnémonaute", elle traverse les mémoires qui dans le temps se superposent et vont s'occultant comme sortilège et ressuscite, au hasard d'un vestige discret, de l'histoire oubliée d'un nom de rue, de l'angle d'une façade, d'une enseigne disparue, le dialogue imperceptible et parfois paradoxal du temps ensorcelé dans l'espace. Ceci que Walter Benjamin soupçonnait au coeur de l'image dialectique en cet instant où “l'Autrefois rencontre le Maintenant dans un éclair pour former une constellation”.
Paris devient oracle, fulguration, théâtre; et les spectres des bâtiments et des reliefs disparus, l'orbite en creux des enceintes de la ville, les hantises des lointaines blessures des suppliciés que la ville a transmutées en métaphores dans le langage: des zodiaques secrets dont elle fait battre le coeur. Le coeur comme la ville: mesure impondérable d'une histoire en profession d'inachèvement.
Comme anciennement les enseignes des tavernes -avant la tardive numérotation des rues- déployaient des énigmes visuelles qui comme la langue des oiseaux des alchimistes cryptaient le sens en jeu d'image et faisait de Paris une allégorie vivante, un rébus chantant: la ville devient par l'enchantement du dialogue des temps mêlés, un cabinet de curiosités à ciel ouvert.
“Mauvais oeil” adressé à ce qui dans l'histoire feint figer les traversées qui s'y répètent, les parts vivantes de ce qui, sensible, remonte le cours de l'invisible comme de la Seine. “Contre-envoûtement” pour réouvrir les pistes des chemins vécus derrière les enclos murés de l'ésotérisme qui comme façades, font oublier que l'issue des songes est une voie profane. Sortilège vivant d'un invisible rendu sensible dans l'expérience de son parcours et le temps d'une visite comme un poème.
Conférencière et écrivain, elle engage depuis plusieurs années un travail d'érudition poétique autour des rues disparues de Paris et de feux leurs noms, des corporations secrètes et de leurs jargons, des miracles qui ont cours en ces Cours itinérantes de l'imaginaire qui comme royaumes, retracent en permanence l'intuition de ses contours. Pour nous engager à la dérive... dérive ou détour en des méandres que le fleuve redouble à la surface, d'une écriture gardée sauve de toute saisie. Et que les Nautes ont mise-à-flot dans une devise.
Pour naviguer toujours.